Ma petite déco festive
My little Christmas setup
Je commence avec un avertissement: ma récolte photographique est plus que maigre, je n'ai pas été très prolifique et j'ai effacé mes meilleures photos par erreur (note à moi-même: avant 10h le matin de Noël, c'est trop tôt pour appuyer sur tous les petits boutons!). J'espère que mes mots réussiront quand même à faire image... Voilà, c'est parti pour le premier Noël d'une Québécoise à Londres!
J'en parle souvent, sur mon blog ou en-dehors: je trouve que le Québec a beaucoup plus d'affinités avec la Grande-Bretagne qu'avec la France, culturellement parlant. Évidemment, la langue est une barrière majeure, mais une fois franchie, on réalise vite que les Québécois sont plutôt des Anglais qui parlent français que des cousins Français expatriés... En tout cas, tout ça pour parler de dinde! Mais avant d'arriver à la dinde: la veille de Noël.
Même à l'intérieur du Québec, chaque famille fête un peu Noël à sa façon, alors c'est difficile de généraliser. Pareil de ce côté-ci, j'ai vécu mon Noël anglais dans une famille en particulier (celle de mon amoureux, pour les curieux), mais pour avoir enquêté un peu je crois que dans les grandes lignes ça se ressemble pas mal partout. Pour vous donner une idée de mon point de comparaison: dans ma famille, au Québec, le gros morceau des célébrations se passe le 24 décembre. On se rassemble à la maison en famille (plus ou moins élargie selon les années et les disponibilités), on cuisine (pas de dinde), et on réveillonne (pas de danse ni de jeux de société). On fait les cadeaux le soir même, on se couche tard, et les enfants, petits et grands, ont toute la journée du 25 pour jouer avec leurs nouveaux jouets!
Ici, en Angleterre, le 24 décembre (qu'on appelle invariablement Christmas Eve, pas 24th December) n'a pas autant d'importance. Beaucoup de gens travaillent, et pour les autres c'est la dernière journée pour finaliser ses achats et voyager pour rejoindre sa famille (sans le savoir, j'ai suivi cette tradition les deux années précédentes en prenant l'avion pour Montréal le 24!). On se rassemble en soirée pour prendre un verre au pub: c'est une bonne excuse pour revoir les gens à qui on ne donnerait pas nécessairement rendez-vous (des amis d'enfance ou des cousins éloignés que l'on retrouve en retournant dans sa ville d'origine), ou simplement pour faire la fête entre amis, comme les Anglais savent si bien le faire! Il est donc généralement admis que le matin de Noël comporte un solide déjeuner pour remettre la gueule de bois en place. Quand il y a des enfants dans la famille, il faut être préparé à un réveil brutal... Noël en lendemain de brosse, c'était un concept nouveau pour moi (mais je dois préciser que j'ai été très raisonnable, et j'étais juste fatiguée de m'être couchée tard)! Pas autant que la veille de Noël entre amis, qui m'a semblée tout aussi étrange, mais pas désagréable pour autant. Sauf que sous la pluie battante, ça ne faisait pas exactement Noël blanc...

Le matin de Noël, on se réveille au doux son de la pluie sur les carreaux, puis du tonnerre... Un bon gros orage le jour de Noël, rien pour me titiller l'esprit des Fêtes! Mince consolation: il a grêlé un peu, ça a fait comme des petits bancs de neige l'espace d'un instant (j'avais une photo qui a connu sa belle mort quelques minutes plus tard). Quand Mère Nature s'est calmée un peu, on est passés de la maison du père à celle de la soeur (et surtout, du neveu de 4 ans) pour le lancement officiel des festivités. Pendant qu'on finit une énième tasse de thé, le petit a commencé à ouvrir ses cadeaux. C'est un vrai marathon pour lui: le salon est presque entièrement couvert (j'avais une belle photo de l'enfant sur-stimulé, mais elle a disparu aussi). Tout le monde s'y met un peu en parallèle pour accélérer le processus, puis quelques heures (et quelques belles surprises!) plus tard, c'est l'heure de manger. C'est comme l'inverse de notre réveillon: plutôt que de s'empiffrer de 20h à minuit, on fait ça entre 14h et 16h à peu près. Dans ce cas-ci, les traditions se ressemblent: dinde, farce, sauce aux canneberges, pommes de terre rôties, légumes vapeur, sauce brune, et un
Yorkshire pudding en plus (j'aurais voulu avoir une photo mais quand j'y ai pensé mon assiette était déjà vide). En fait, le Noël québécois est un peu un croisement de nos origines: on réveillonne à la française, mais on mange sensiblement la même chose que les Anglais (ce n'est pas tout le monde qui mange de la dinde – il n'y en a pas chez nous – mais en même temps je ne connais personne qui mange du foie gras et des marrons glacés à Noël au Québec). Il y avait de la bûche de Noël pour dessert, et mon premier
Christmas pudding! Je ne comprends pas trop pourquoi les
fruit cakes,
Christmas puds et autres
mince pies sont aussi polarisants: beaucoup de gens ne peuvent pas les sentir, mais en bout de course le mélange de fruits secs, d'épices, de sucre et d'alcool ne me semble pas si extrême... Ceci dit, je mange du gâteau aux fruits chaque année d'aussi loin que je me souvienne (tradition paternelle), alors j'étais bien préparée à l'expérience. Bon, le
Christmas pudding, c'est dense, c'est sucré, et ça arrive quand on a déjà beaucoup trop mangé, mais en ce qui me concerne, avec un petit coup de crème, ça passe comme un charme!
Après le repas, tout le monde est pas mal somnolent, entre la soirée de la veille, le réveil prématuré et la surabondance de nourriture, alors on fait une petite sieste collective en regardant un film de Noël. Il se passe quand même quelques chocolats, quelques chips, entre deux tasses de thé... Puis pour se réactiver un peu, on sort les jeux de société, et le
Christmas quiz! Je n'en ai jamais fait l'expérience mais beaucoup de pubs organisent des quiz régulièrement, auxquels tout le monde peut s'inscrire et gagner un prix en répondant correctement à une série de questions d'intérêt plus ou moins général. Pour des raisons culturelles évidentes, je ne suis pas vraiment au niveau côté
trivia anglais, mais en version maison (et adaptée pour la Canadienne) c'est quand même le type de jeu que je tolère le mieux... après Pictionary peut-être!
À un moment j'ai un peu perdu la notion du temps, avec les repas décalés et la nuit qui commence à tomber à 15h... On a mangé un sandwich à la dinde en cours de soirée (et oui, on avait encore faim!), peut-être regardé encore un film ou deux, et fini un mot croisé avec l'aide de toute la famille... Généralement,
Christmas Day est une journée plutôt relax où on peut prendre le temps de ne rien faire et juste... être ensemble. Pour nous le
farniente s'est étalé sur quelques jours, et c'est vraiment ce qu'il me fallait! Ce n'était peut-être pas le Noël auquel je suis habituée, mais au moins c'était les vacances...
Quelques notes en vrac:
- Les cartes de souhaits, ici, c'est du sérieux, surtout à Noël. Les gens s'en envoient à la tonne, et se les remettent aussi en main propre (surtout en famille, mais parfois aussi entre amis). Je trouve le geste touchant, mais inutile quand on voit les gens et qu'on passe du temps avec eux. Pour moi, la carte est une petite pensée pour ceux avec qui on n'aura pas de contact direct (les avez-vous reçues?), et j'aime bien y mettre les efforts nécessaires. Ici, un simple «Merry Christmas Machin, Love, Chose» suffit amplement. Après, on étale bien toutes les cartes sur le manteau de cheminée, et une fois Noël passé, hop, poubelle! Évidemment, pour être poli, il ne faut surtout pas arriver les mains vides, alors on serre les dents et on participe à la valse du papier gaspillé...
- C'est peut-être juste moi, mais avec les cartes de souhait, le tricot de Noël est un autre incontournable du temps des Fêtes qui n'a pas vraiment décollé par chez nous. Moi qui me cassais la tête pour savoir quoi porter pour mon premier Noël dans la famille de mon amoureux, cherchant le bon équilibre de style festif, spécial, mais assez confortable pour passer la journée dedans, manger beaucoup, et jouer à quatre pattes avec un petit garçon énergique tout en faisant bonne impression... Matt m'a juste regardée comme si je me montais un bateau: mais, tu portes ton Christmas jumper, voyons! Ah, mais oui, fallait y penser: on le porte seulement à Noël (quand on est sain d'esprit) donc ça fait spécial, il peut être aussi discret ou flamboyant qu'on le désire (moi ça me prenait des couleurs fluo, évidemment), et pour le confort, on ne fait pas mieux! En plus, on reste bien au chaud. Voilà une tradition que je vais garder pas trop loin...
- Pour se tenir chaud, un autre accessoire essentiel: le thé. Pas seulement un élément de cohésion au sein d'une équipe de travail, c'est aussi un point tournant du devoir d'hôtesse. Le principe est simple: beau temps, mauvais temps, jour ou soir, quand un visiteur arrive, il doit être muni d'un breuvage (chaud ou froid, alcoolisé ou soft) dans les 15 secondes après avoir passé la porte. Et pas question pour la visite de refuser, quand on vous offre à boire, vous acceptez (moi je joue la carte de l'étrangère et je me permets de refuser de temps en temps... et quand j'ai atteint mon quota de thé, je demande de l'eau. Oui, je vis sur la corde raide.)
- Le déjeuner/dîner de lendemain de brosse par excellence: un sandwich au bacon, l'une de mes révélations culinaires personnelles de 2012. OK, on s'entend, dans notre tête de Québécois, ça sonne un peu décadent: le bacon, c'est un accompagnement, ça vient avec du poulet, ou des tomates, un oeuf, quelque chose... Ce serait comme un sandwich à la laitue, mais en beaucoup plus mauvais pour les artères. Sauf que le bacon anglais est différent: un peu l'équivalent de notre bacon de dos canadien, donc des tranches plus épaisses, moins striées de gras, et surtout moins cuites, quelque part entre la tranche de jambon salé (pas nécessairement fumé) et les minces tranches croustillantes que l'on connaît (le streaky bacon, tel qu'on l'appelle ici). Autant j'aime d'amour le streaky bacon, autant je n'ai pas développé d'attirance particulière pour le moite bacon anglais, jusqu'à ce qu'on me le serve en sandwich! Entre deux tranches blanches ou dans un petit roll croûté, avec plein de ketchup, il prend tout son sens... Il a le droit d'être moins croustillant et d'assumer son côté jambon, qui me fait déculpabiliser de manger un sandwich contenant exclusivement du bacon. La laitue, les tomates et l'avocat sont en option (mais fortement conseillés quand on a envie de changer).
- La nourriture anglaise a mauvaise réputation, et jusqu'à tout récemment je pensais que ce stéréotype était un reliquat d'une époque révolue. Il est vrai que la cuisine moderne dans les restaurants londoniens n'a rien à envier aux capitales gastronomiques du reste du monde; même dans les pubs, qu'ils soient gastro ou pas, on trouve presque partout un fish and chips ou un sausage roll passablement réussis qui en bouchent un coin, British-style. Bon, ce n'est pas tout le monde qui aime les patates au four garnies de purée et accompagnées de frites, le tout noyé de gravy, mais on ne peut nier que ça a son charme, et c'est même essentiel par une cinquième journée pluvieuse consécutive, préférablement avec une pinte de cidre pas trop loin... Mais dans la folie pré-Noël, quand on a beaucoup de monde à voir et que personne ne veut recevoir, on se retrouve un peu prisonnier des restaurants, pubs et autres auberges qui offrent des menus festifs pré-établis pour les groupes, et c'est là que ça devient triste. Un roast dinner maison, c'est bon, mais certains Anglais ont conservé, encore aujourd'hui, une fâcheuse tendance à tuer les légumes (carottes en compote et choux de bruxelles pré-mâchés, bonjour), à tout accompagner de pommes de terre et/ou de diverses sauces douteuses, et même parfois – scandale! – à sur-cuire la viande et/ou à la servir tiède. J'ai beaucoup aimé rencontrer plein de nouveaux gens et vivre l'esprit de Noël à l'anglaise, j'ai réussi à trop manger malgré tout (surtout du dessert, parce que là la tradition anglaise n'a vraiment pas son égal), mais après une semaine de pré- et post-festivités, j'avais peur d'avoir attrapé le scorbut...
- En lien avec le point précédent, je pense que le contraste a été encore plus fort pour moi parce que je me suis gavée d'émissions de cuisine «spécial Noël» pendant tout le mois de décembre. J'adore les chefs anglais, leurs restaurants, leurs livres (déformation professionnelle) et leurs émissions. Ils sont nombreux, différents, inspirants: Nigella Lawson et Jamie Oliver bien sûr, les piliers de la nouvelle cuisine anglaise «maison», mais aussi le délirant Heston Blumenthal, le flamboyant Gordon Ramsay, le rassurant Hugh Fearnley Whittingstall, l'exotique Yotam Ottolenghi, la douce Lorraine Pascale, les sucrés Paul Hollywood et Mary Berry, et les moins connus comme Stevie Parle, Sam & Sam Clark, Rachel Khoo, et j'en passe... Je suis incapable de suivre religieusement une série télé mais j'aime bien tomber sur Masterchef, The Great British Bake-off, The Spice Trip, Jamie's 30 Minute Meals, Saturday Kitchen, et leurs émissions de Noël respectives. J'étais tout émoustillée à l'idée d'avoir plein de temps libre pour cuisiner, et de goûter à toutes ces spécialités que je ne connaissais pas. Finalement, la réalité est un peu différente, j'aurais dû m'en douter... J'ai quand même tenté mon premier boeuf Wellington, mais pour le reste je me suis laissée nourrir avec le plaisir inhérent au fait de ne pas avoir à faire à manger soi-même!
Mise à jour
Commentaire de ma grand-mère: «Ma mère (donc mon arrière-grand-mère, francophone, du fin fond de sa campagne québécoise) avait l'habitude de cuisiner un Christmas pudding à chaque année pour le souper de Noël.» C'est pas pour rien que je me sens anglaise!
Commentaire de Matt: «Je pense que tu exagères la quantité de thé qu'on boit.» Rien à ajouter.
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